"RESTRUCTURING AND CONTROL" SECTION
L’agent Manfred Schlickenrieder démasqué
Manfred Schlickenrieder est un espion qui a travaillé pour un ou plusieurs services secrets. Au début des années quatre-vingt, il créa à Munich “ Groupe 2 ”, une structure dont le but explicite était d’infiltrer le mouvement révolutionnaire international par le biais de publications et d’un bureau d’archives. Tout cela ressort clairement du matériel qui nous a été transmis et de recherches intensives que nous publions en annexe et sur notre site Internet. Nous n’indiquerons pas nos sources ni nos méthodes de recherche afin de ne pas dévoiler notre façon de travailler. Mais l’authenticité de nos documents ne fait pas le moindre doute. Manfred Schlickenrieder nous a fourni lui-même les preuves définitives du bien-fondé de nos soupçons. Afin de faire taire les doutes qui commençaient à se dessiner quant à l’intégrité de sa personne, il a remis en août de cette année à un camarade de notre organisation un dossier élaboré par lui-même sur les membres du Revolutionärer Aufbau et quelques rapports portant sa signature. Ses efforts pour minimiser l’impact de ce matériel ont non seulement été vains, mais ont livré la preuve éclatante de l’authenticité du matériel qui nous est parvenu. Une comparaison avec les originaux nous a confirmé sans équivoque le fait que sous le nom de “ Camus ”, Manfred Schlickerieder a consigné soigneusement pendant des années chaque rencontre, chaque séance et chaque entretien téléphonique à l’attention de ses services. Et ce n’est pas tout : l’agence de production de vidéos gérée par Groupe 2 a permis aux services de Protection de l’Etat de filmer tout à loisir des manifestations et opérations. Les photos du fichier relatif au Revolutionärer Aufbau proviennent sans exception du matériel vidéo produit par Groupe 2. Nos connaissances précises sur ses activités d’agent reposent sur une faible quantité de données (par rapport à la durée de ses activités, qui remontent à des dizaines d’années) : matériel concernant notre organisation et certains camarades, documents et informations des services secrets d’Italie et de France. Jusqu’à ce jour, nous n’avons pas réussi à établir avec certitude pour quel ou quels service(s) secret(s) Schlickenrieder a travaillé durant les vingt dernières années. Les preuves dont nous disposons et l’étendue de ses activités suggèrent l’implication du Bundesnachrichtendienst (BND) aussi bien que du Bundesverfassungsamt (BfV). Les décomptes minutieux [1] témoignent d’un engagement fixe, et le train de vie extrêmement aisé de Schlickenrieder semble indiquer qu’il disposait certainement de moyens. Un document trouvé chez lui montre qu’il entretenait une étroite collaboration avec les services secrets italiens SISDE :
“ Nous ne disposons pas encore d’informations concernant l’appartement à LIEU où auraient habité de temps en temps NOM et NOM et le dépôt d’armement que NOM et NOM sont censés connaître et qui permet de s’approvisionner en armes et en munitions. Nous avons fait suivre la présente demande au SISDE, qui ne nous a pas encore répondu jusqu’à maintenant. ” [2]
Schlickenrieder a travaillé au moins à titre informel avec le MAD. Son meilleur ami, Karsten Banse, fut agent du MAD pendant des années pour adhérer ensuite, selon Schlickenrieder, à Groupe 2. Au cours de ces années, Karsten Banse avait fait l’objet d’une procédure administrative pour une affaire de pots-de-vin : il avait touché 5000 DM, soi-disant à titre de remboursement d’un prêt, de Werner Mauss, un agent secret dont on connaît la sombre réputation. Nous ignorons si Schlickenrieder entretenait lui aussi des contacts avec Mauss. Nous avons par contre la preuve que Banse a procuré à Schlickerieder le contact avec l’ex-agent MI6 Michael Reynolds dit “ Mike ”. Par le biais de la firme “ Hakluyt ” créée par ce dernier, Groupe 2 a donc travaillé directement pour le capital multinational et a systématiquement espionné les groupes anti-Shell alors actifs. Pour de plus amples informations sur cette affaire, nous vous renvoyons au chapitre suivant “ Groupe 2 : mercenaire du capital impérialiste ”.
Pour donner une image exhaustive du tort qu’il nous a causé, nous publions tous les documents que nous avons découverts sur Manfred Schlickenrieder et Groupe 2 sur notre site Internet http://www.aufbau.org dans la rubrique “ documents originaux ” (Originaldokumente). Pour en faciliter la lecture, nous les avons complétés avec des commentaires sur ses méthodes de travail et un diagramme de cette plate-forme de renseignements.
Selon ses dires, Schlickenrieder était à la fin des années septante membre du comité local de la section munichoise du KPD/ML. Selon ses dires également, il avait déjà été alors soupçonné d’espionnage pour la police. Il produisait déjà à l’époque des films, comme la “ Pastoralsymphonie ” en 1976. Après ce détour dans le groupe K, Schlickenrieder infiltre systématiquement la gauche révolutionnaire, utilisant ses connaissances dans la production de films et de vidéos. En 1980, il signe un projet au titre évocateur (“ Spurensicherung ”). La structure qu’il mit en place porta pendant les premières anées le nom de “ Werkstattfilm und Dokumentation München ”,. Elle avait son siège à son domicile, Humboldstrasse 38, à Munich. “ Groupe 2 ” est un nom qui apparaît pour la première fois en 1982 sur un tract relatif à des arrestations de camarades de la RAF. Plus tard, dans une présentation brève du “ Medienprojekt Gruppe 2 ”, Schlickenrieder décrit cette structure en ces termes :
“ Un noyau composé d’abord de quatre, maintenant de deux personnes, avec en plus un cercle plus ou moins grand de soutiens et de collaborateurs, du traducteur salarié au sponsor qui investit de l’argent dans la production. [3] Les projets en chantiers sont les suivants :
a) Film documentaire sur les Brigades Rouges
b) Documentation au long cours sur “ Löwenbräu-City ”
c) Enregistrements originaux et cassettes “ chansons italiennes du mouvement ouvrier italien ”
d) Documentation de textes “ Brigades Rouges ”.
Le film sur les BR devait servir de tremplin pour tisser des liens avec le mouvement révolutionnaires italien. “ Pour ce film, des recherches sont menées depuis deux ans, trois voyages ont été entrepris en Italie pour établir des contacts et deux séances de tournage ont été organisées. Quatre semaines de tournage supplémentaires doivent avoir lieu en septembre ”.[4] Pendant ces voyages, Schlickenrieder établit de premiers contacts qu’il entend approfondir plus tard, principalement par le biais de deux camarades du Revolutionärer Aufbau. Quelques citations à ce propos dans un “ document stratégique ” qu’il a rédigé fin 94/début 95 :
“ Les personnes qui se regroupent autour de XY (liste des personnes connues ici avec leurs antécédents politiques dans le dossier 2[5] ) sont souvent des gens issus du milieu ou étant connus pour des activités terroristes durant les années septante et quatre-vingt.
Ces deux personnes étaient autrefois en contact étroit avec des personnes appartenant à des groupes et à des organisations terroristes, ont travaillé pendant des années pour les prisonniers (…) et il est prouvé qu’elles ont aidé à passer dans la clandestinité et à séjourner illégalement certaines personnes recherchées pour être liées à des activités terroristes (…) et qui ont ensuite organisé dans la clandestinité de nouvelles structures terroristes.
…
Selon les décisions prises en automne 1994, les personnes et groupes cités sous 1a-f constituent à bref et à moyen terme les piliers des plans opérationnels à l’échelon international. … Les axes de notre travail au niveau des contacts à l’étranger se situent donc, par ordre de priorité, dans les pays suivants :
1) la Suisse et l’Italie
2) la Belgique
3) la France
4) l’Espagne
L’ordre reflète forcément la qualité des contacts préexistants et de la collaboration déjà mise en place, qui offrent de très bonnes bases en Suisse et en Italie. En Belgique, ils peuvent être activés à tout moment pour servir nos intérêts, alors qu’en France et en Espagne, ils font pratiquement défaut – d’où l’importance négligeable de ces deux pays pour le moment.
En Italie aussi, presque toutes les forces/structures politiques consacrent beaucoup d’énergie à l’analyse de leur histoire. La reprise du tournage du film sur l’histoire de la lutte armée, commencé en Italie dans les années 1986/87 sans avoir été achevé, serait une contribution allant dans le sens de cet objectif. Vu l’abondance du matériel préexistant couvrant la totalité de la période des BR, de 1970 à 1987, on pourrait commencer tout de suite par une “ mise à jour ”, autrement dit, ce projet permettrait de contacter directement n’importe qui dans presque tous les domaines par des interviews et des entretiens censés apporter les compléments d’information nécessaires à sa réalisation. Cela nous épargnerait des préparatifs techniques et rédactionnels fastidieux. Sur demande ou si cela s’avère nécessaire, ce projet donnerait accès aux secteurs de l’Autonomie et/ou à de nouvelles alliances. ”
Les réflexions de Schlickenrieder et de ses complices sur le “ film en Italie ”, dont le tournage reprit déjà en 1985, sont on ne peu plus claires. Ce projet n’était cependant qu’une partie du plan d’infiltration du mouvement révolutionnaire. Une autre possibilité d’établir des contacts et de se procurer des adresses intéressantes étaient les archives. A cet effet, Schlickenrieder loua le 1er janvier 1988 un premier local Sommerstr. 24, à Munich, pour un loyer de 870 DM. Au cours de notre enquête, un camarade nous a révélé pourquoi beaucoup de gens évitaient à l’époque ces archives: pour les utiliser, il fallait y décliner son identité et indiquer ses coordonnées…
En 1988 paraît le premier numéro de la revue –texte - éditée par “ Groupe 2 ” de Schlickenrieder. On y trouve sous le titre “ Klassenkampf oder ‘politische Lösung ? Materialien zur Amnestie-Diskussion ””, un ramassis confus de positions politiques sans commentaires, une approche de la discussion alors en cours qui laissait perplexes les camarades impliqués en Italie et en Suisse. Cette publication, comme d’ailleurs plus tard la publication simultanée de la revue “ RAPPORTI SOCIALI ”, poursuivait deux objectifs. Premièrement, la récolte d’adresses :
“ Vu l’obligation de préciser davantage ces données, mais l’impossibilité de le faire dans ce contexte, notre bureau d’archives offre ces informations complémentaires à tous ceux qui s’intéressent aux positions et à l’évolution de la discussion en Italie. Pour tout renseignement, s’adresser à la rédaction. ”[6]
Et deuxièmement, le développement d’une présence au sein du mouvement révolutionnaire, comme l’énonce Schlickenrieder dans un rapport :
“ Le projet d’édition allemande de RAPPORTI SOCIALI, auquel NOM attache une importance particulière, devrait être concrétisé. Notre propre participation rendrait possibles et nécessaires une discussion de fond et des commentaires sur les opinions politiques des Suisses, en plus qu’elle permettrait d’acquérir des. informations personnelles sur NOM. Qui plus est, RAPPORTI SOCIALI est le projet commun (du moins vers l’extérieur) de tous les groupes et organisations précités. Travailler à compléter l’édition internationale (italien, français, anglais) par une édition allemande serait en l’occurrence une occasion d’entrer directement en contact avec les éditeurs – en particulier avec NOM en Italie. La participation aux rencontres internationales serait automatique. La parution de la revue ou du numéro 1 en langue allemande permettrait par ailleurs, du fait que nous en assurerions la distribution en RFA, d’identifier les contacts correspondants en Suisse et en Italie (la distribution se fait actuellement de manière centralisée par l’édition de Aufbau). ” [7]
La revue –texte – paraît par la suite à intervalles irréguliers, et dans le choix des thèmes, l’accent suit exactement le mandat de Schlickenrieder. On y trouve presque uniquement des contributions de groupes armés. Jusqu’au dernier numéro, le 8, les propres prises de position politiques se limitent à des contributions parues en 1995 sous le titre “ Lutte armée, politique révolutionnaire et partis dans l’Europe actuelle, témoignages sur l’histoire contemporaine ” ((en all.)). Durant ces années, Groupe 2 publie de nombreux autres documents, comme la traduction allemande des textes de la CCC belge “ La flèche et la cible ”. Il produit par ailleurs deux films vidéo sur l’histoire de Mumia Abu Jamal et sur le développement historique de la RAF, sous le titre “ was wären wir für Menschen ? ”.
Notre histoire avec M.S. et Groupe 2
Nos contacts avec M.S. remontent aux années quatre-vingt, c’est-à-dire bien avant la constitution du mouvement Revolutionärer Aufbau, en 1992. Une camarade fit sa connaissance lors d’un tournage avec l’activiste des Black Panther Dorouba, en RFA. Leurs contacts restèrent par la suite assez vagues, ils se connaissait sans travailler concrètement ensemble. Au début 1993 les contacts avec Groupe 2 s’intensifièrent, entretenus principalement par la camarade précitée et un camarade, tous deux membres du Revolutionärer Aufbau Zurich. Rétrospectivement, on constate que l’intérêt de Schlickenrieder pour ces deux personnes n’était en aucun cas le fait du hasard, étant donné les bons contacts de ceux-ci avec le mouvement communiste international, contacts qu’ils entretenaient par les activités régulières à l’échelon international.
Ces contacts portaient concrètement sur l’édition de la revue “ Subversion ” et, à partir de 1993, la traduction et la production d’une version allemande de la revue communiste italienne “ RAPPORTI SOCIALI ”. Comme nous partagions la plupart des idées politiques, et en particulier l’analyse de la crise capitaliste exposés des camarades de “ RAPPORTI SOCIALI ”, nous travaillions depuis des années avec ce groupe. La proposition de M.S. d’organiser la traduction et l’impression d’une édition en langue allemande de “ RAPPORTI SOCIALI ” tombait à pic pour nous. Il existait déjà à ce stade des éditions italienne et française de la revue. Une analyse marxiste de la situation à partir des conditions objectives faisait précisément défaut en RFA. M.S. organisait la traduction, nous contrôlions les textes traduits et en tant qu’éditeur suisse, nous en rédigions la préface. Nous n’avons appris que plus tard que les textes étaient traduits au prix fort par des traducteurs professionnels. Avec l’impression, financée elle aussi par les services de Schlickenrieder, le numéro devait revenir largement à plus de 10 000 marks. Comme le prouvent les propositions opérationnelles rédigées durant cette période par Schlickenrieder, cet argent était en quelque sorte le prix du billet d'accès au mouvement communiste international.
“ Le projet d’édition allemande des RAPPORTI SOCIALI, auquel NOM attache une importance particulière, devrait être concrétisé… La participation aux rencontres internationales serait automatique. ”
Nous avions certes remarqué au cours de toutes ces années que dans ses publications, Schlickenrieder n’exprimait en fait jamais d’opinion politique fondée. Dans les discussions aussi, même s’il soulevait des questions (sa formation en groupe K lui venant en aide), il ne les approfondissait pas et n’y revenait pas sérieusement lors des rencontres ultérieures. Nous nous sommes expliqué cette attitude comme étant la conséquence de sa façon de travailler. Nous le voyions comme un homme taciturne qui passait son temps seul à cogiter dans son bureau . La distance géographique et la disparité des réalités politiques entre la Suisse et l’Allemagne faisaient obstacle à une action commune dans la pratique. Celle-ci aurait bien sûr immédiatement modifié nos rapports avec lui, vu qu’elle contraint à une réflexion politique plus approfondie.
Il y a environ quatre ans, nous avons observé qu’il poussait toujours plus loin le pragmatisme et devenait de moins en moins fiable. Il donnait l’impression de se dépolitiser, d’être tout simplement épuisé de toutes ces années à travailler seul. Nous nous demandions aussi si tout se passait bien dans ce Groupe 2.
Afin de déjouer la méfiance croissante, Schlickenrieder déclara à un camarade du Revolutionärer Aufbau qu’il avait des problèmes de relation. Interrogé concrètement sur la situation au sein de Groupe 2, il exposa la version suivante des faits : cette structure s’est créée il y a des années et en regard des événements de l’Automne 77 en Allemagne, elle a décidé de travailler en partie sous couvert. Elle a décidé concrètement de ne se manifester ouvertement qu’en la personne de Schlickenrider, le reste du groupe restant en retrait pour mener les discussions politiques et soutenir financièrement le projet. Schlickenrieder a déclaré toutefois qu’il considérait maintenant la clandestinité comme un mauvais choix, d’autant plus que les autres membres s’étaient depuis longtemps retirés de la politique. Raison pour laquelle il avait l’intention de sortir du Groupe 2 et de gérer lui-même cette structure.
Nous avons alors proposé de fusionner ce qui restait du Groupe 2 avec le Revolutionärer Aufbau, ce dont il ne fut pas très emballé, au début. Il essaya de retarder la discussion, avançant tous les prétextes et excuses possibles. Après coup, son comportement nous paraît maintenant évident. Il évitait de se lier trop étroitement à nous puisque cela aurait impliqué des débats politiques plus conséquents et des démarches concrètes. En l’occurrence, ce n’est pas un hasard que l’abcès ait crevé à peine deux mois après son entrée dans notre organisation. Cela montre aussi que si Schlickerieder avait pu si bien fonctionner pendant toutes ces années, c’est entre autres parce que nous ne l’avions pas poussé à des discussions de fond. Notre intérêt s’était limité de plus en plus au réseau de distribution qu’il nous mettait à disposition en Allemagne. Autant dire que nous étions prêts à passer sur certaines imperfections et problèmes superficiels. Le principal, c’était que la distribution se passe bien sur le plan technique. On ne pourra jamais suffisamment lutter contre une telle attitude.
Groupe 2 : mercenaire du capital impérialiste
En 1996, Schlickenrieder s’est vu proposer un emploi par firme Hakluyt, sise à Londres, par l’intermédiaire de son ami Karsten Banse (MAD). La philosophie d’entreprise de cette maison fondée par deux ex-agents du MI6, Mike Reynolds et Christopher James, ne laisse planer aucun doute sur sa mission :
“ The idea was to do for industry what we had done for the government.”[8]
Cet aveu sans détour du fondateur de l’entreprise, Sir James, peut se traduire ainsi : nous ne proposons plus nos services d’espionnage au gouvernement, mais directement au capital. Nous ignorons si Schlickenrieder a proposé ses services à cette firme par cupidité ou sur mandat de son propre employeur. Nous n’avons connaissance que des derniers rapports transmis à son service, qui datent de début 1999 [9]. Quoi qu’il en soit, Schlickenrieder est chargé en 1996 par Hakluyt de réunir du matériel sur les groupes anti-Shell. Il ne faut pas avoir beaucoup d’imagination pour deviner à qui Hakluyt destinait ces informations, quand on sait que dans son Conseil d’administration siégeait un “ former chairman of Royal Dutch Shell [10] ”. A cette époque, la multinationale Shell a de bonnes raisons de s’inquiéter des activités de toutes sortes de groupes en raison de la vaste campagne lancée contre elle suite à l’assassinat de Ken Saro Wiwa au Nigéria et au sabordage de la plate-forme pétrolière Brent-Spar.
Schlickenrieder réussit à merveille à utiliser l’image de gauche de Groupe 2, connu pour la production de films vidéo (was wären wir für menschen…[11]) pour espionner au service de Shell. De Greenpeace jusqu’aux groupes autonomes, en passant par les Verts, il signale à son employeur tout projet d’opérations intentées contre Shell.
L’échange de correspondance entre les deux agents Reynolds et Schlickenrieder ne saurait traduire plus clairement le but de leurs activités : Sous le titre “ du nouveau à l’ouest ”, Mike Reynolds envoie ainsi le 8 mai 1997 à “ son cher Manfred ” un message électronique écrit dans un allemand parfait :
La phase suivante de l'opération débutera lundi prochain (pas de presse jusqu’au 12 mai à 00h01), avec la publication (ici) d’un rapport de 64 pages sur la protection du climat soulignant la nécessité absolue de ne pas extraire se pétrole jusqu’à ce que TOUTES les ressources déjà entamées soient épuisées.
L’auteur du rapport de Greenpeace UK – titre en anglais “ Putting The Lid on Fossil Fuels ” s’appelle Chris Rose, Campaigns Director. Je ne peux pas (encore) t’envoyer de copie, je n’en ai pas moi-même parce que je viens d’en transmettre au client un premier exemplaire tout frais sorti de presse. Après lundi, tu recevras une copie. Ici comme en Allemagne, aucun indice notable à relever annonçant le lancement prochain d’une opération. Le MV de Greenpeace a effectué quelques manoeuvres aux environs de la zone pétrolifère, mais sinon, rien à signaler – il est amarré en ce moment dans un port devant les Shetlands.
Question concrète : Dans la discussion, a-t-on seulement abordé les aspects de droit quant à la question de savoir s'il fallait oui ou non attaquer la manière de faire de GP dans l’opération Brent Spar? Si par exemple le client dépose plante devant les tribunaux (pour perte de production), que peut faire GP pour sauver sa fortune de la faillite? J'aimerais entendre l'avis de tes informateurs à ce sujet, même s'il s'agit d'un problème général et que nous ne soyons pas forcément concernés en particulier. Naturellement, ce dernier point n'en revêt pas moins une importance cruciale.
Ce sera tout pour aujourd'hui – salut
Mike" [12]
A citer encore un rapport de Schlickenrieder adressé à Reynolds, le 10 septembre 1997, dont la première page, dans le feu de l'action, a malheureusement été mal copiées:
... Après Magdebourg, nous pourrons très probablement prévoir correctement et de manière fiable le développement à long terme du réseau entier, vu ses ramifications internationales..
2) A propos de nos amis verts à Hambourg
A Hambourg, j'ai profité de l'occasion pour m'entretenir avec deux personnes (indépendamment) de la situation actuelle dans la maison. J'ai obtenu de l'une comme de l'autre les informations suivantes – ce qui devrait en gros être la vérité:
Le moral et les prévisions pour les interventions menées jusqu'ici par les guerriers verts ne sont pas bons. Il s’est tenu à ce propos deux réunions du "cercle interne ” dont nous ignorons toutefois l’ordre du jour et la teneur. On sait cependant dans la maison que 1), le travail de relations publiques concernant l'opération n'a pas eu les résultats escomptés; les échos dans la presse sont restés largement en deçà des pronostics. Même les journaux favorables à la maison n'ont donné qu'un maigre compte rendu des opérations lancées dans l'Atlantique et n'ont pas couvert les événements en continu. Selon les guerriers, il est particulièrement négatif que pratiquement aucun article de fond ne soit paru sur le sujet, et que les opérations n'aient donc été relatées que de manière superficielle pour de larges couches de lecteurs. Même la contribution d'un des "journaux internes" – la taz, qui est favorable à GP – a été décevante et n'a pas utilisé (du moins jusqu'à maintenant) les textes préparatoires de Hambourg prêts à être imprimés.
... Par ailleurs, le fait que les "groupes de contact" (locaux n'aient pas été impliqués a vraisemblablement été critiqué. Dans cette affaire, ces groupes sont restés pratiquement inactifs. Indépendamment de ces événements, on dit qu'il existerait dans la maison un document analysant les éléments fondamentaux du travail de GP entre les dépendances GP internationales, et qui devrait jouer un rôle lors de la prochaine séance annuelle.
Contrairement au rapport "Stimmungsbericht" ("impressions générales") qui, même selon une interprétation prudente, me semble exprimer la vérité pour ce qui concerne les ratages antérieurs – les faits évoqués dans cette analyse de fond ne peuvent naturellement pas être vérifiés, quoique bien des indices suggèrent qu'il y ait du vrai dans cette orientation "fondamentale".
C'est tout ce que j'ai à dire sur le document "Stimmungsbericht" de Hambourg, qui est proposé gratuitement.
S'agissant de l'affaire 1) en cours, une certaine activité se manifeste ici depuis fin septembre – j'aurai donc certainement davantage de faits intéressants à rapporter prochainement.
Voilà pour aujourd'hui, peut-être nous verrons-nous la semaine prochaine. Sinon, la consigne est comme toujours: téléphoner si l'on a des questions.
Cordialement
M" [13]
La nature des recherches menées par Schlickenrieder est évidente: il s'agit de rendre compte de l'appréciation des opérations déjà menées à bien, des interventions projetées et de "l'état d'esprit des guerriers verts", c’est-à-dire de Greenpeace Hambourg.
Afin d'écarter tout soupçon sur la structure de Groupe 2, l'agent Schlickenrieder est allé jusqu'à produire avec une petite partie du matériel déjà amassé un film anti-Shell intitulé fort à propos "Business as usual". Ce dernier a par la suite été montré plusieurs fois en RFA. Schlickenrieder n'avait jamais parlé de ce film aux membres du Revolutionärer Aufbau, il ne l'avait donc pas annoncé dans notre journal ni sur notre site.
REVOLUTIONAERE AUFBAU
Le grand train de vie de Schlickenrieder:
Loyer pour l'appartement Claude Lorrainestr. 35a, Munich 1800.—
Loyer pour un bureau Fasanenstr. 142, Unterhaching 1700.—
Assurance maladie privée 1000.—
Leasing pour VM Sharon verte 600.—
Assurance/entretien BMW Z3 noire (!) 500.—
Frais divers mensuels (selon décompte) 1650.—
Ce qui fait au total 7250 marks de coûts fixes, soit un budget mensuel d'environ 10 000 marks avec les repas, les vêtements, les vacances, etc.
[1] Frais de déplacements, frais de véhicule et frais extraordinaires, décembre 98 et décembre 96 (annexe)
[2] citation de la liste de noms de camarades italiens (annexe) qui a été trouvée
[3] Projet médias du "Groupe 2" – présentation succincte, 12 juillet 1987
[4] Cf. Autres docs
[5] Il s'agit probablement de fiches concernant de nombreux camarades italiens
[6] Citation des "Remarques préliminaires à cette documentation", - texte – n° 1
[7] Citation du rapport de Schlickenrieder "Considérations stratégiques", cf. annexe
[8] Financial Times du 23 mars 2000, "Master of the great game turn to business"
[9] Rapport de contacts de janvier 99 et décompte de frais pour décembre 98
[10] Financial Times du 23 mars 2000
[11] Titre du film produit par le Groupe 2 sur l'histoire de la RAF
[12] Courrier électronique de Mike Reynolds, [101620,3364] à Manfred Schlickenrieder, [101727, 2454], annexe
[13] Rapport de Schlickenrieder à Reynolds du 10 septembre 1987 sur l'état d'esprit chez les guerriers verts (fichier)